lundi 12 octobre 2015

Réunion Givry Solidarités Citoyenneté du 24 septembre : Les réfugiés - Intervenant : Philippe BAUMEL

Réunion Givry Solidarités Citoyenneté du 24 septembre
Thème : les réfugiés  -  Intervenant : Philippe BAUMEL
 
 
Introduction : Jean-Michel BOIVIN
 
Bonsoir à tous, merci d’être venus si nombreux ce soir.
Ce soir, ce qui nous réunit, c’est la solidarité et la citoyenneté : ce qui se passe en Europe en ce moment, et particulièrement les migrations, qui se déroulent à nos portes, ne peuvent pas nous laisser insensibles.  C’est un problème qui va influencer le cours de notre histoire, va influer sur notre vie.
« La solidarité n’est pas un sentiment de compassion vague ou d’attendrissement superficiel. C’est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le bien commun. »
La solidarité c’est un acte dans la durée, c’est une attitude qui dépasse la réaction émotive et qui engage. Avant un engagement, il faut bien réfléchir, c’est pourquoi nous avons invité Philippe BAUMEL, notre député, membre de la commission des affaires étrangères :
  • pour nous informer exactement de l’accueil des réfugiés en France,
  • de ce qui est fait,
  • ce qui se fera fait,
  • ce qu’il y a faire.
  •  Pour le bon déroulement de la soirée, il y aura d’abord un exposé de Philippe BAUMEL, puis nous passerons au débat
  
Intervention de Philippe BAUMEL, député
          Il nous partage son analyse à partir de ce qu’il a eu comme informations en tant que parlementaire.
          A la racine de toute l’immigration, rien n’est résolu : Syrie, Afrique centrale, Erythrée…
 
1. La Syrie
La plus grande partie des gens qui émigrent viennent de Syrie. 240 000 décès en Syrie depuis 4 ans. Un pays livré aux 2/3 à DAECH. Une bande côtière est plus ou moins administrée par Bachar El Assad. Le reste est livré à une guerre entre l’opposition et Bachar El Assad. Il y a 2 ans déjà, on s’était posé la question de la démocratie en Syrie…
          En Europe sur 500 000 entrées irrégulières en 2015, il y avait 40% de Syriens. A l’avenir il pourrait arriver 1 million de Syriens en Allemagne. A l’origine des départs, la guerre et les exactions commises par Daech. Depuis 2 ans, 350 000 demandes d’asile ont été déposées par des Syriens en Europe. Comme la guerre s’est considérablement renforcée, les migrations se sont accélérées.
Au Liban : 1 million de réfugiés Syriens. L’accueil est dispersé dans tout le pays. La moitié du PIB libanais est dédié aux réfugiés. Cela fait une grande fragilisation du Moyen Orient ; il y a évolution des alliances entre pays ; l’accord avec l’Iran « rebrasse les cartes ». Pour des raisons économiques et politiques, l’émigration s’accroît. L’Iran était resté isolé, maintenant il revient et pourrait entrer dans une éventuelle coalition contre DAECH, avec une alliance de puissances financières considérables (Qatar, Arabie Saoudite). Les bateaux français par ex ont été rachetés par l’Egypte avec l’argent de l’Arabie Saoudite.
Intérêts économiques : le pétrole, le gaz. Le projet de gazoduc en Syrie a été arrêté à cause de la guerre. C’est donc difficile pour le Qatar d’exporter son gaz en Europe.
En France, notre propre sécurité est menacée : militaires dans les trains, Vigipirate… Daech organise la formation de terroristes depuis la Syrie, pour agir le temps venu en Europe, dont la France (ex de l’attaque dans le Thalys).
La France se pose la question d’une forme d’intervention là-bas. Actuellement c’est la reconnaissance aérienne (qui existait déjà par les avions qui allaient en Irak) qui est officialisée. Pas d’intervention au sol prévue pour le moment (cf le bourbier afghan qui bloque). Ceux qui seraient « pour » la reconnaissance aérienne pensent que ça ne résoudra pas le problème de ne faire que de l’aérien. Le débat reviendra sur le tapis à l’ONU (proposition de résolution internationale la semaine prochaine) et ailleurs, après les frappes aériennes.
Bachar El Assad : un tortionnaire sanguinaire de son peuple. Comment envisager qu’il soit la clé d’une solution pacifique ? Les opposants syriens refusent Bachar et accepteraient éventuellement de discuter avec des dignitaires actuels du régime.
Il faudra voir l’attitude des USA, de l’Europe, et des Russes (qui font un peu de provocation). Quelle sera l’attitude de Poutine ? Soutien à Bachar ? Soutien à une coalition ? Quels intérêts aura-t-il ? Selon la situation en Ukraine.
 
2. Comment accueillir ces flots de réfugiés ?
Rappel : dans les années 70, nous avons accueilli plus de 120 000 boat people en Europe occidentale. Lors du conflit des Balkans, plus d’1 million de Serbes notamment sont arrivés en Europe. L’objectif d’accueillir aujourd’hui 24 000 réfugiés en France ne paraît donc pas insurmontable.
Qui sont ces migrants ?
Ceux qui viennent en France et en Europe sont issus des classes moyennes et ont un bon niveau d’études (avocats, professeurs, médecins…); ils ont les capacités financières pour payer les passeurs. Ils avaient un bagage, une belle situation, c’est donc bien d’un exil politique qu’il s’agit le plus souvent.
L’opposition est souvent faite entre l’accueil des migrants étrangers et le travail pour « nos pauvres » ! De tout temps la France a accueilli des gens qui fuyaient la guerre et elle a été terre d’asile. L’accueil des migrants se fera avec les millions du budget européen ; ce n’est pas la même « caisse » que pour le RSA français par exemple !
Une critique fréquente entendue : le gouvernement aurait trop longtemps hésité. En tant que parlementaire, il peut dire que des choses se sont faites : vote de la réforme du droit d’asile (passé de 24 mais à 9 mois pour statuer), 11 000 places d’accueil supplémentaires depuis juin, engagement de 276 millions d’euros pour l’hébergement d’urgence.
Des centres d’hébergement et d’accueil sont en train d’être crées dans les pays d’accueil direct des migrants : 1,8 millions d’euros du budget européen sera versé aux pays frontaliers qui accueillent (à confirmer d’ici quelques mois)
Accueil en France où de nombreux locaux sont vides :
1000€ versés par an aux communes volontaires, par place d’accueil créée
+ 1000 € versés par la région Bourgogne Franche Comté
+ aides pour les bailleurs sociaux (1000€ par logement mis à disposition)
Il faut structurer l’accueil dans des villes assez grandes afin que les réfugiés ne se sentent pas isolés.
 
DEBAT
Questions 1 à 4
1. 1000 par an ? Pour combien de temps ? Et après ?
2. Dans le tableau mondial tracé, quelle est la place de la Chine ?
3. Aspect religieux du problème, Sunnites et Chiites ?
4. Où en est aujourd’hui la situation des réfugiés ?
 Réponses
1. et 4. Actuellement dans le département, il n’y a qu’une seule famille car les communes ne savaient pas trop comment faire. On ne sait pas pour combien de temps il y aura ce versement de 1000€ par an. Les familles voudraient surtout pouvoir travailler, ou rentrer chez elles si la guerre s’arrête. Le préfet a enregistré plusieurs dizaines de logements vacants, essentiellement dans les agglomérations, pour mieux coordonner. Certaines propositions sont généreuses (accueillir chez soi) mais « farfelues » (terme retiré ensuite). On suppose qu’il voulait dire que cela ne pouvait être réaliste dans la durée ni efficace pour l’intégration…
2. La Chine ne s’est pas prononcée pour le moment : ils ne se « mêlent pas des affaires des autres ». Toutefois, le président chinois est venu demander aux USA un soutien économique. En contrepartie, on peut espérer que les Chinois se rangeront derrière le clan de l’accueil, aussi d’ailleurs pour se démarquer des Russes.
Hongrie : résurgence des valeurs « toxiques ». Problème philosophique des députés européens qui portent ces valeurs… Ces idées ne reposent pas sur des réalités économiques.
3. Chiites/ Sunnites
D’après Philippe Baumel le problème est plutôt politique que religieux. Les racines de l’Islam ne sont pas totalitaristes. La géographie religieuse est « piégeante ». Il faut reconstruire la laïcité dans ces pays, notamment la Syrie. Les opposants syriens viseraient plutôt une république laïque
Questions 5 et 6
5. Pour la France, 24 000 personnes, c’est très réalisable mais d’autres vagues vont venir, à cause d’autres risques (climat). Comment nous, Français, Européens et habitants du monde, allons-nous gérer ces migrations énormes ?
6. Bénévoles à l’ATSI : la situation actuelle des gens dans les CADA, en fin de parcours et de droits et qui attendent d’être régularisés depuis 4 ans. La préfecture n’avance pas. Les primo-arrivants ne sont pas hébergés. Tous ces gens sont un potentiel de vie pour notre pays
En régularisant et en donnant le droit au travail, on libérerait des places pour les réfugiés syriens.  30 logements libres dans le Chalonnais, 400 appartements à Chalon même.
 Réponses
6. Il faut libérer les places dans les CADA. Il faut avoir conscience des places vides dans les logements sociaux. On va être contraints d’accueillir et d’accompagner. Malheureusement tout le monde n’est pas persuadé de cela et certains veulent rester « entre eux ». Il y a une liste de mairies volontaires mais d’autres qui refusent.  L’accueil des réfugiés est une chance pour le pays, une occasion de régénérer le corps social.
 5. La situation en Libye est un cauchemar. Ce pays est traversé par une quantité de migrants de toute l’Afrique. Les causes : le climat mais aussi l’abandon du développement des pays pauvres. La compromission dans des logiques de captation des matières premières (cf rapport de Philippe Baumel sur ce sujet en ligne sur le site parlementaire). On n’est pas au bout de nos difficultés.
La situation au Mali : c’était bien d’intervenir mais pourquoi rester ? Les Maliens ont l’impression que les Français sont une armée d’occupation. Autre exemple : les coopératives du coton ont été remplacées par des multinationales → désertification des sols ; elles sont ensuite parties en laissant les gens dans la misère.
Il est possible de faire des projets en réelle coopération Europe/ Pays du Sud.
Questions 7 à 9
7. Poutine, soutien de Bachar ? Gaz d’Arabie Saoudite ? Une guerre ouest/ est ??
8. Accueil : quel accompagnement ? Comment soutenir ? Quelles associations ?
9. Logement : beaucoup d’associations se battent pour « mettre au chaud » l’hiver des gens. Est-ce qu’on va recréer des ghettos ?
 Réponses
7. Poutine : oui, on peut s’inquiéter. Il a peu apprécié l’attitude occidentale lors du conflit ukrainien. Les Russes, dont Poutine, se sentent héritiers de la vieille Russie (des Tsars). Le premier empire russe a été créé à Kiev et l’Ukraine est perçue obligatoirement comme partie intégrante de la  Russie (cf pour nous l’Alsace et la Lorraine). Les Russes ont donc été désagréablement surpris par l’attitude européenne et française au moment de Maïdan. La plupart des Russes au pouvoir sont francophones et francophiles en général et ont donc très mal accepté l’attitude française, qui semblait suivre l’OTAN, d’où leur envie d’aller plus loin dans la provocation.
En Syrie ils ont envoyé du matériel et 200 militaires. C’est dans ce jeu de provocation, pour se faire considérer par l’opinion internationale, ils cherchent aussi qqn pour les aider à se positionner autrement. Il faut trouver ce qu’il y a de mieux à faire avec les Russes. Le refus de vendre les bateaux de guerre à Poutine c’était pour éviter qu’il n’envahisse les pays baltes.
Sur l’affaire syrienne, les USA ont été inconséquents. Il y a deux ans la France avait proposé une coalition pour intervenir et les USA ont refusé. Cela aurait évité une telle ampleur.
 8. Préfet : coordonnateur dans le département pour définir les capacités d’accueil contrôlé par le Ministère. + un délégué départemental.
9. Ne pas créer des ghettos, ne pas concentrer les populations. Trouver un juste milieu entre mettre tout le monde ensemble en ghettos et avoir des familles isolées dans des quartiers ou villes différentes.
 
Questions 10 à 13
10. Emmaus. Accueil et réinsertion. Que peut faire le Préfet ? Il faut débloquer les situations.
11. En Saône-et-Loire qui coordonne l’accueil des Syriens ?
12. Pour la Syrie, certains migrants sont la moelle du pays ? Comme le pays se relèvera-t-il ?
13. Que faire demain en se levant ?
 Réponses
10.11.  L’accueil actuel en chambre d’hôtels est absurde car trop cher. Vu l’ampleur des arrivées, on ne pourra pas garder les mêmes règles d’accueil et de droit d’asile. Il faut débloquer les situations, et trouver des solutions.
12. Une bonne partie de l’élite syrienne a quitté la Syrie. Actuellement, ils disent vouloir reconstruire leur pays donc rentrer chez eux dès la fin de la guerre. C’est un enjeu important : il faut arrêter le conflit le plus rapidement possible.
 13. Il est préférable d’accueillir les migrants dans un vrai logement plutôt que sur un canapé ou dans sa famille. Il faut faire entrer les gens dans la société, dans le système. Leur intégration sera meilleure.
 
Conclusion de Philippe BAUMEL
Avoir ensemble la volonté de nous coordonner pour faire face à l’arrivée de nombreux réfugiés. Se mettre ensemble sur une base citoyenne, dans les associations, pour que les pouvoirs publics suivent et que les choses changent. Il faut aller vers un consensus pluraliste pour mener vers une société ouverte. La France est toujours regardée dans le monde, mais il faut être à la hauteur !
Il faut exiger des préfets de faire bouger les choses. Etre fidèle à la fraternité républicaine.
  
Conclusion de Jean- Michel BOIVIN.
Merci à tous d’avoir répondu présent à cette soirée.
Je laisse une feuille pour ceux qui veulent aller plus loin et faire quelque-chose à notre niveau.
Nous dresserons une invitation pour une rencontre prochaine.
Compléments de l’ASTI et autres associations
« ASTI » Les Polonais ont été aussi beaucoup accueillis en France et maintenant ? Ils se sont logiquement installés. Du Liban, beaucoup sont venus à un moment puis repartis.
Il ne faut pas laisser ce problème à la seule discrétion du Préfet et du délégué départemental ; On peut se regrouper à 10, 15, 50, pour louer un logement par exemple…
ASTI 2 cours Marcel Pagnol à Chalon (près du marché du stade)  astirefugies@gmail.com
« Esprit civique » : regroupement les 16-17 octobre sur toute la France (voir le site sur Internet)
 « Habitat et Humanisme » : la fédération s’est engagée à accueillir des réfugiés et à les accompagner, ce qu’elle fait toujours pour les populations qu’elle héberge.
« Paroisse de Givry » : le prêtre a émis le souhait d’organiser l’accueil d’une famille sur la paroisse. S’il se fait quelque chose à partir de GSC, ce serait bien de se coordonner.


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