Réunion Givry Solidarités Citoyenneté du 24
septembre
Thème : les réfugiés -
Intervenant : Philippe BAUMEL
Introduction : Jean-Michel
BOIVIN
Bonsoir
à tous, merci d’être venus si nombreux ce soir.
Ce
soir, ce qui nous réunit, c’est la solidarité et la citoyenneté : ce qui
se passe en Europe en ce moment, et particulièrement les migrations, qui se
déroulent à nos portes, ne peuvent pas nous laisser insensibles. C’est un problème qui va influencer le cours
de notre histoire, va influer sur notre vie.
« La
solidarité n’est pas un sentiment de compassion vague ou d’attendrissement
superficiel. C’est la détermination ferme et persévérante de travailler pour le
bien commun. »
La
solidarité c’est un acte dans la durée, c’est une attitude qui dépasse la
réaction émotive et qui engage. Avant un engagement, il faut bien réfléchir,
c’est pourquoi nous avons invité Philippe BAUMEL, notre député, membre de la
commission des affaires étrangères :
- pour nous informer exactement de l’accueil des réfugiés en France,
- de ce qui est fait,
- ce qui se fera fait,
- ce qu’il y a faire.
Intervention de
Philippe BAUMEL,
député
Il nous partage son analyse à partir
de ce qu’il a eu comme informations en tant que parlementaire.
A la racine de toute l’immigration,
rien n’est résolu : Syrie, Afrique centrale, Erythrée…
1. La Syrie
La
plus grande partie des gens qui émigrent viennent de Syrie. 240 000 décès
en Syrie depuis 4 ans. Un pays livré aux 2/3 à DAECH. Une bande côtière est
plus ou moins administrée par Bachar El Assad. Le reste est livré à une guerre
entre l’opposition et Bachar El Assad. Il y a 2 ans déjà, on s’était posé la
question de la démocratie en Syrie…
En Europe sur 500 000 entrées
irrégulières en 2015, il y avait 40% de Syriens. A l’avenir il pourrait arriver
1 million de Syriens en Allemagne. A l’origine des départs, la guerre et les
exactions commises par Daech. Depuis 2 ans, 350 000 demandes d’asile ont
été déposées par des Syriens en Europe. Comme la guerre s’est considérablement
renforcée, les migrations se sont accélérées.
Au
Liban : 1 million de réfugiés Syriens. L’accueil est dispersé dans tout le
pays. La moitié du PIB libanais est dédié aux réfugiés. Cela fait une grande
fragilisation du Moyen Orient ; il y a évolution des alliances entre
pays ; l’accord avec l’Iran « rebrasse les cartes ». Pour des
raisons économiques et politiques, l’émigration s’accroît. L’Iran était resté isolé,
maintenant il revient et pourrait entrer dans une éventuelle coalition contre
DAECH, avec une alliance de puissances financières considérables (Qatar, Arabie
Saoudite). Les bateaux français par ex ont été rachetés par l’Egypte avec
l’argent de l’Arabie Saoudite.
Intérêts
économiques : le pétrole, le gaz. Le projet de gazoduc en Syrie a été
arrêté à cause de la guerre. C’est donc difficile pour le Qatar d’exporter son
gaz en Europe.
En
France, notre propre sécurité est menacée : militaires dans les trains, Vigipirate…
Daech organise la formation de terroristes depuis la Syrie, pour agir le temps
venu en Europe, dont la France (ex de l’attaque dans le Thalys).
La
France se pose la question d’une forme d’intervention là-bas. Actuellement
c’est la reconnaissance aérienne (qui existait déjà par les avions qui allaient
en Irak) qui est officialisée. Pas d’intervention au sol prévue pour le moment
(cf le bourbier afghan qui bloque). Ceux qui seraient « pour » la
reconnaissance aérienne pensent que ça ne résoudra pas le problème de ne faire que
de l’aérien. Le débat reviendra sur le tapis à l’ONU (proposition de
résolution internationale la semaine prochaine) et ailleurs, après les frappes
aériennes.
Bachar
El Assad : un tortionnaire sanguinaire de son peuple. Comment envisager
qu’il soit la clé d’une solution pacifique ? Les opposants syriens
refusent Bachar et accepteraient éventuellement de discuter avec des
dignitaires actuels du régime.
Il
faudra voir l’attitude des USA, de l’Europe, et des Russes (qui font un peu de
provocation). Quelle sera l’attitude de Poutine ? Soutien à Bachar ?
Soutien à une coalition ? Quels intérêts aura-t-il ? Selon la
situation en Ukraine.
2. Comment accueillir ces flots de réfugiés ?
Rappel :
dans les années 70, nous avons accueilli plus de 120 000 boat people en
Europe occidentale. Lors du conflit des Balkans, plus d’1 million de Serbes
notamment sont arrivés en Europe. L’objectif d’accueillir aujourd’hui
24 000 réfugiés en France ne paraît donc pas insurmontable.
Qui
sont ces migrants ?
Ceux
qui viennent en France et en Europe sont issus des classes moyennes et ont un
bon niveau d’études (avocats, professeurs, médecins…); ils ont les
capacités financières pour payer les passeurs. Ils avaient un bagage, une belle
situation, c’est donc bien d’un exil politique qu’il s’agit le plus souvent.
L’opposition
est souvent faite entre l’accueil des migrants étrangers et le travail pour
« nos pauvres » ! De tout temps la France a accueilli des gens
qui fuyaient la guerre et elle a été terre d’asile. L’accueil des migrants se
fera avec les millions du budget européen ; ce n’est pas la même
« caisse » que pour le RSA français par exemple !
Une
critique fréquente entendue : le gouvernement aurait trop longtemps
hésité. En tant que parlementaire, il peut dire que des choses se sont
faites : vote de la réforme du droit d’asile (passé de 24 mais à 9 mois
pour statuer), 11 000 places d’accueil supplémentaires depuis juin,
engagement de 276 millions d’euros pour l’hébergement d’urgence.
Des
centres d’hébergement et d’accueil sont en train d’être crées dans les pays
d’accueil direct des migrants : 1,8 millions d’euros du budget européen
sera versé aux pays frontaliers qui accueillent (à confirmer d’ici quelques
mois)
Accueil
en France où de nombreux locaux sont vides :
1000€
versés par an aux communes volontaires, par place d’accueil créée
+
1000 € versés par la région Bourgogne Franche Comté
+
aides pour les bailleurs sociaux (1000€ par logement mis à disposition)
Il
faut structurer l’accueil dans des villes assez grandes afin que les réfugiés
ne se sentent pas isolés.
DEBAT
Questions 1 à 4
1. 1000€ par
an ? Pour combien de temps ? Et après ?
2. Dans le tableau
mondial tracé, quelle est la place de la Chine ?
3. Aspect religieux du
problème, Sunnites et Chiites ?
4. Où en est
aujourd’hui la situation des réfugiés ?
1.
et 4. Actuellement dans le département, il n’y a qu’une seule famille car les
communes ne savaient pas trop comment faire. On ne sait pas pour combien de
temps il y aura ce versement de 1000€ par an. Les familles voudraient surtout
pouvoir travailler, ou rentrer chez elles si la guerre s’arrête. Le préfet a
enregistré plusieurs dizaines de logements vacants, essentiellement dans les
agglomérations, pour mieux coordonner. Certaines propositions sont généreuses
(accueillir chez soi) mais « farfelues » (terme retiré ensuite). On
suppose qu’il voulait dire que cela ne pouvait être réaliste dans la durée ni
efficace pour l’intégration…
2.
La Chine ne s’est pas prononcée pour le moment : ils ne se « mêlent
pas des affaires des autres ». Toutefois, le président chinois est venu
demander aux USA un soutien économique. En contrepartie, on peut espérer que
les Chinois se rangeront derrière le clan de l’accueil, aussi d’ailleurs pour
se démarquer des Russes.
Hongrie :
résurgence des valeurs « toxiques ». Problème philosophique des
députés européens qui portent ces valeurs… Ces idées ne reposent pas sur des
réalités économiques.
3.
Chiites/ Sunnites
D’après
Philippe Baumel le problème est plutôt politique que religieux. Les racines de
l’Islam ne sont pas totalitaristes. La géographie religieuse est « piégeante ».
Il faut reconstruire la laïcité dans ces pays, notamment la Syrie. Les opposants
syriens viseraient plutôt une république laïque
Questions 5 et 6
5. Pour la France, 24 000
personnes, c’est très réalisable mais d’autres vagues vont venir, à cause d’autres
risques (climat). Comment nous, Français, Européens et habitants du monde, allons-nous
gérer ces migrations énormes ?
6. Bénévoles à
l’ATSI : la situation actuelle des gens dans les CADA, en fin de parcours
et de droits et qui attendent d’être régularisés depuis 4 ans. La préfecture
n’avance pas. Les primo-arrivants ne sont pas hébergés. Tous ces gens sont un
potentiel de vie pour notre pays
En régularisant et en
donnant le droit au travail, on libérerait des places pour les réfugiés
syriens. 30 logements libres dans le
Chalonnais, 400 appartements à Chalon même.
6.
Il faut libérer les places dans les CADA. Il faut avoir conscience des places
vides dans les logements sociaux. On va être contraints d’accueillir et
d’accompagner. Malheureusement tout le monde n’est pas persuadé de cela et certains
veulent rester « entre eux ». Il y a une liste de mairies volontaires
mais d’autres qui refusent. L’accueil
des réfugiés est une chance pour le pays, une occasion de régénérer le corps
social.
La
situation au Mali : c’était bien d’intervenir mais pourquoi rester ?
Les Maliens ont l’impression que les Français sont une armée d’occupation.
Autre exemple : les coopératives du coton ont été remplacées par des
multinationales → désertification des sols ; elles sont ensuite parties en
laissant les gens dans la misère.
Il
est possible de faire des projets en réelle coopération Europe/ Pays du Sud.
Questions 7 à 9
7. Poutine, soutien de Bachar ? Gaz
d’Arabie Saoudite ? Une guerre ouest/ est ??
8. Accueil : quel
accompagnement ? Comment soutenir ? Quelles associations ?
9. Logement :
beaucoup d’associations se battent pour « mettre au chaud » l’hiver
des gens. Est-ce qu’on va recréer des ghettos ?
7.
Poutine : oui, on peut s’inquiéter. Il a peu apprécié l’attitude
occidentale lors du conflit ukrainien. Les Russes, dont Poutine, se sentent
héritiers de la vieille Russie (des Tsars). Le premier empire russe a été créé
à Kiev et l’Ukraine est perçue obligatoirement comme partie intégrante de la Russie (cf pour nous l’Alsace et la
Lorraine). Les Russes ont donc été désagréablement surpris par l’attitude
européenne et française au moment de Maïdan. La plupart des Russes au pouvoir
sont francophones et francophiles en général et ont donc très mal accepté
l’attitude française, qui semblait suivre l’OTAN, d’où leur envie d’aller plus
loin dans la provocation.
En
Syrie ils ont envoyé du matériel et 200 militaires. C’est dans ce jeu de
provocation, pour se faire considérer par l’opinion internationale, ils
cherchent aussi qqn pour les aider à se positionner autrement. Il faut trouver
ce qu’il y a de mieux à faire avec les Russes. Le refus de vendre les bateaux
de guerre à Poutine c’était pour éviter qu’il n’envahisse les pays baltes.
Sur
l’affaire syrienne, les USA ont été inconséquents. Il y a deux ans la France
avait proposé une coalition pour intervenir et les USA ont refusé. Cela aurait
évité une telle ampleur.
9.
Ne pas créer des ghettos, ne pas concentrer les populations. Trouver un juste
milieu entre mettre tout le monde ensemble en ghettos et avoir des familles
isolées dans des quartiers ou villes différentes.
Questions 10 à 13
10. Emmaus. Accueil et
réinsertion. Que peut faire le Préfet ? Il faut débloquer les situations.
11. En Saône-et-Loire
qui coordonne l’accueil des Syriens ?
12. Pour la Syrie,
certains migrants sont la moelle du pays ? Comme le pays se
relèvera-t-il ?
13. Que faire demain en
se levant ?
10.11. L’accueil actuel en chambre d’hôtels est
absurde car trop cher. Vu l’ampleur des arrivées, on ne pourra pas garder les
mêmes règles d’accueil et de droit d’asile. Il faut débloquer les situations,
et trouver des solutions.
12.
Une bonne partie de l’élite syrienne a quitté la Syrie. Actuellement, ils
disent vouloir reconstruire leur pays donc rentrer chez eux dès la fin de la
guerre. C’est un enjeu important : il faut arrêter le conflit le plus
rapidement possible.
Conclusion de Philippe
BAUMEL
Avoir
ensemble la volonté de nous coordonner pour faire face à l’arrivée de nombreux
réfugiés. Se mettre ensemble sur une base citoyenne, dans les associations,
pour que les pouvoirs publics suivent et que les choses changent. Il faut aller
vers un consensus pluraliste pour mener vers une société ouverte. La France est
toujours regardée dans le monde, mais il faut être à la hauteur !
Il
faut exiger des préfets de faire bouger les choses. Etre fidèle à la fraternité
républicaine.
Conclusion
de Jean- Michel BOIVIN.
Merci
à tous d’avoir répondu présent à cette soirée.
Je
laisse une feuille pour ceux qui veulent aller plus loin et faire quelque-chose
à notre niveau.
Nous
dresserons une invitation pour une rencontre prochaine.
Compléments de l’ASTI
et autres associations
« ASTI »
Les Polonais ont été aussi beaucoup accueillis en France et maintenant ?
Ils se sont logiquement installés. Du Liban, beaucoup sont venus à un moment
puis repartis.
Il
ne faut pas laisser ce problème à la seule discrétion du Préfet et du délégué
départemental ; On peut se regrouper à 10, 15, 50, pour louer un logement
par exemple…
« Esprit
civique » : regroupement les 16-17 octobre sur toute la France (voir le
site sur Internet)
« Paroisse
de Givry » : le prêtre a émis le souhait d’organiser l’accueil d’une
famille sur la paroisse. S’il se fait quelque chose à partir de GSC, ce serait
bien de se coordonner.